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Dissertation sur œuvre. Jean-Luc LAGARCE, Juste la fin du ...

Dissertation JL LAGARCE LPB/DUBY, 2021. Dissertation sur uvre. Jean-Luc LAGARCE, Juste la fin du monde (Solitaires intempestifs, 1990). Dans quelle mesure la pi ce tudi e Juste la fin du monde consiste-t-elle, comme le dit Fran ois BERREUR, en un quilibre de tensions 1 ? Juste la fin du monde est la pi ce la plus jou e et la plus tudi e de cet auteur qui aura d di . l'essentiel de sa br ve existence au th tre : metteur en sc ne (de IONESCO), directeur de troupe ( La Roulotte , avec sa fid le actrice Mirelle HERBSTMEYER), diteur (les Solitaires intempestifs), commentateur (expert du th tre de la violence, notamment des Tragiques grecs2) et bien-s r dramaturge, attach d noncer les conventions et questionner le vouloir-dire. Fran ois BERREUR. compagnon de la premi re heure jusqu' la derni re, et m me au-del puisqu'il est son ayant-droit d sormais, a souvent comment le go t de ce dernier pour les contrastes dans son th tre, et notamment ce qu'il appelle l' quilibre de tensions.

Dissertation JL LAGARCE LPB/DUBY, 2021 Dissertation sur œuvre. Jean-Luc LAGARCE, Juste la fin du monde (Solitaires intempestifs, 1990). Dans quelle mesure la pièce étudiée Juste la fin du monde consiste-t-elle, comme le dit François BERREUR, en « un équilibre de tensions »1? Juste la fin du monde est la pièce la plus jouée et la plus étudiée de cet auteur qui aura dédié

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1 Dissertation JL LAGARCE LPB/DUBY, 2021. Dissertation sur uvre. Jean-Luc LAGARCE, Juste la fin du monde (Solitaires intempestifs, 1990). Dans quelle mesure la pi ce tudi e Juste la fin du monde consiste-t-elle, comme le dit Fran ois BERREUR, en un quilibre de tensions 1 ? Juste la fin du monde est la pi ce la plus jou e et la plus tudi e de cet auteur qui aura d di . l'essentiel de sa br ve existence au th tre : metteur en sc ne (de IONESCO), directeur de troupe ( La Roulotte , avec sa fid le actrice Mirelle HERBSTMEYER), diteur (les Solitaires intempestifs), commentateur (expert du th tre de la violence, notamment des Tragiques grecs2) et bien-s r dramaturge, attach d noncer les conventions et questionner le vouloir-dire. Fran ois BERREUR. compagnon de la premi re heure jusqu' la derni re, et m me au-del puisqu'il est son ayant-droit d sormais, a souvent comment le go t de ce dernier pour les contrastes dans son th tre, et notamment ce qu'il appelle l' quilibre de tensions.

2 Jusqu'o peut-on se figurer la pi ce Juste la fin du monde comme un exercice funambulesque ou un clair-obscur ? Nous examinerons comment l'instabilit dramaturgique sert la pi ce. En second lieu, nous observerons comment la coexistence des tonalit s dessine une sociologie ainsi qu'une philosophie originales. Enfin, nous verrons quel r quilibrage perp tuel Juste la fin du monde propose, contrairement son titre apocalyptique et non sans ironie. Juste la fin du monde est la fois l'histoire d'une famille d sunie, ainsi que d' tre d chir s, et l'histoire d'une tentative d sesp r e de se rassembler. Les membres de cette famille sont la fois clat s et rassembl s, en crise et d sireux d'une r conciliation. La liste des personnages d s le d but de la pi ce, avant m me le texte, fait appara tre le manque du p re, qui n'est voqu que dans la tirade de la m re (premi re partie, sc ne 4). Du p re on sait seulement qu'il tenait sa voiture, l ment r current du texte qui signifie la force des habitudes et du mat riel dans un paysage social modeste o les apparences de la normalit valent d j pour signes de r ussite et sont, ce titre, surinvestis.

3 Les personnages lacunaires sont aussi les enfants : la fille dont on sait Juste qu'elle ressemble Antoine puis ne ressemble personne, puis qu'elle a des cheveux. C'est dommage. (premi re partie, sc ne 2). Le personnage de Louis est un fuyard, un passant dans la vie et sa famille, qui n'adh re pas : il est d'ailleurs d fini, dans l' pilogue par les expressions de mouvement: Je pars. , Je me remets en route , mes pas sur le gravier. Mais dans cette m me famille en crise, on veut aussi se relier. D s la liste des personnages, on observe que la famille reste leur ancrage, puisqu'ils sont tous reli s, sauf Louis, les uns aux autres : Suzanne, sa soeur , Antoine, leur fr re tandis que la cheffe de famille cumule les preuves d'ancrage affectif : La m re, m re de Louis, Antoine et Suzanne. Malgr tout ce qui les oppose (parfois violemment, comme le montre l'usage de la vulgarit Ta gueule , premi re partie, , ou de la menace Si tu me touches, je te tue , seconde partie, sc.)

4 2), les personnages n'ont de cesse de chercher se c toyer, confronter et m langer. Les personnages n'ont de cesse de s'appeler pendant l'interm de : O est- ce que tu es ? demande la m re, O est-ce qu'ils sont ? s'inqui te Suzanne en sc ne 5, et Je vous cherchais avoue la m re en sc ne 7. Ils ont en outre du mal quitter la sc ne, comme Suzanne qui se r sume une voix ( Voix de Suzanne : - Oui ? ) demeurant en sc nes 5 puis 7 une locutrice et interlocutrice accessible tous les autres. On est donc disjoints et ensemble dans cette pi ce, et l'on en retrouve m me la traduction dans la gestion de la parole dramatique puisqu'on oscille entre dialogues vifs (Antoine/Suzanne en premi re partie sc ne 9 ou deuxi me partie, sc ne 2), sc nes furtives de transition (ainsi les sc nes composant l'interm de) et longues tirades (longue tirades de Suzanne puis de la m re respectivement en premi re partie sc nes 3 et 4) quasiment monologues (Louis en premi re partie sc ne 10 ou Antoine en sc ne finale).

5 1. Cf. dossier SCEREN/CNDP, 2008. 2. JL LAGARCE, Th tre et pouvoir en Occident, Les Solitaires intempestifs, d. posth. (2011). Dissertation JL LAGARCE LPB/DUBY, 2021. Le rythme qui se dilate ou se resserre, souligne l' tat de tension entre les personnages et accompagne la relation instable qui se noue galement entre le spectateur et la sc ne, le spectateur alternant les sc nes d'emballement collectif et les arr ts sur image motifs. Voir Juste la fin du monde consistera composer avec cette vie sc nique irr guli re et cette gestion d'une parole dramatique changeante, . l'image des relations familiales o les m mes personnages qui se d chirent, comme Suzanne et ses fr res peuvent aussi bien se parler avec rudesse ( Suzanne, fous- nous la paix en premi re partie). qu'avec tendresse : c'est l'amour puis nous t'aimions (de fa on transparente et r p t e) (Suzanne Antoine, son fr re, l'interm de). Les m mes personnages se dissocient, s'affrontent et se retrouvent.

6 L'extr me r versibilit des relations entre les personnages permet de faire vivre la pi ce et donne corps une intrigue qui ne promet, dans son point de d part au prologue, pas beaucoup de suspens, d'autant plus que tout est annonc : dire ma mort prochaine et irr m diable . L' ventail large des possibilit s relationnelles liant les personnages fait l'action de la pi ce et permet de comprendre le revirement dont l'interm de est l'axe sym trique : Louis vient d'abord se faire entendre, puis c'est lui qui coute. Dit autrement, Louis vient parler et finalement ce sont les autres (jusqu' Antoine, apoth ose de la pi ce) qui s'expriment et se r v lent. Juste la fin du monde tient la fois du tragique et du comique. L'aspect tragique de la pi ce ne fait aucun doute si l'on se r f re au titre, de tonalit apocalyptique ( fin du monde ) ainsi qu'au lexique ( mourir mon tour au d but et mort prochaine et irr m diable en fin de prologue) : d'embl e, et au risque de saisir le spectateur, la pi ce se place sous une p e de Damocl s et la fatalit d'une issue sans retour possible.

7 La gravit revient, de fa on plus tamis e et cependant confirm e avec absent , oublis et regretterai (dernier mot de la pi ce). en pilogue. La pi ce est donc plac e sous la double banni re de la disparition et du manque. La pesanteur de l'atmosph re s'explique aussi par la situation conflictuelle entre les membres de la famille : les pr dictions et projections sur Louis ( vous n'aurez pas d'enfant ), sans appel, qui ont scell le sort du personnage, mais aussi la r partition sch matique des r les, radicale : Louis l'intellectuel doux et Antoine, caract ris par cet adjectif qu'on lui renvoie souvent au visage, brutal . (deuxi me partie, sc ne 2). Pourtant, les larmes sont loin de dominer. Il y a aussi dans la pi ce des moments cocasses, qui d dramatisent et privil gient le spectacle divertissant. L'humour est ainsi pr sent dans les reprises, non sans causticit , des formules toutes faites ch res JL LAGARCE (il est l'auteur d'un pr cis satirique de R gles de savoir-vivre dans la soci t moderne3) : On dit qu'elle ressemble Antoine ( ) exactement son portrait en fille ( ) on dit toujours des choses comme a, de tous les enfants.

8 Le r cit des pique-niques en famille fait sourire du fait de l'accumulation de clich s : le premier dimanche des cong s d' t , on disait qu'on partait en vacances, et le soir, en rentrant, on se disait que tout compte fait, on se disait qu'on tait mieux la maison . La famille bruyante, impatiente puis lasse de sa journ e et finalement casani re a quelque chose de typiquement franchouillard, ce qu'on retrouve dans le descriptif aussi superflu que trivial du menu dominical : salade de riz avec du thon et de la mayonnaise et des ufs durs (premi re partie, sc ne 4). Les effets de contraste sont m me exploit s pour d tendre l'atmosph re et souligner, par l aussi, l'incongruit . essentielle de toute existence humaine : Aujourd'hui ( ) une fille, et vous ne pourriez la reconna tre, elle a grandi et elle a des cheveux. C'est dommage. Dans le bilan final ( c'est dommage ), le tour pr sentatif et le pronom d monstratif renvoient probablement l'absence de l'enfant (que Louis ne conna tre donc pas) et aussi au fait qu'elle ait chang , et non pas ce qui pr c de imm diatement elle a des cheveux ) ; la logique l mentaire veut qu'on ne regrette pas qu'une enfant ait une chevelure !

9 Mais la succession de propositions elle a des cheveux/ C'est dommage ne manque pas de cr er l'illusion d'une relation de cause effet. Ce voisinage malencontreux des propositions qui peut faire craindre des d ductions malvenues, brouillant la bonne compr hension, traduit la g ne de Catherine mais montre aussi en filigrane tout le potentiel absurde des conversations et des existences, o tout s'entrechoque avec tout. On pourrait m me voir dans les vocations r currentes de la voiture (marqueur social de la famille dont LAGARCE, fils d'ouvriers de chez Peugeot, avait une conscience 3. JL LAGARCE, Les R gles du savoir-vivre dans la soci t moderne, Solitaires intempestifs, 1996. Dissertation JL LAGARCE LPB/DUBY, 2021. aigu ) une forme de recurring gag l' gal d'un comique de r p tition comme a pu le pratique un MOLIERE ( le poumon, vous dis-je ! dans Le Malade imaginaire). Ce qui est int ressant, c'est la simultan it ainsi que la r versibilit du pire en meilleur, du grave en l ger.

10 L'effort d'adaptation demand au spectateur est int ressant en ce qu'il appelle une constante r actualisation des impressions : Antoine le brutal devient l'homme qui pleure, Louis l'intellectuel s'av re d cevant (il n' crit au fond que des cartes postales sa famille : quoi bon savoir crire si on ne sait plus r diger ?) et de la m me fa on une m me sc ne comprend de quoi rire et pleurer. Plus encore, le d fi communicationnel relever est celui de l'infra-discours : Catherine qui s'embourbe dans sa pr sentation de la g n alogie et faisant mine d'int grer Louis le disqualifie comme jamais ou encore la m re qui narrant les sorties dominicales croit parler des frangins mais fait surtout l'impasse sur sa fille Suzanne, d cid ment accessoire). L' difice communicationnel, instable, d multiplie les possibilit s de lecture, dans les lignes et entre les lignes, du spectateur. Aucun personnage ne se laisse en effet enfermer dans une fatalit de la compr hension acquise ou du jugement d finitif.


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