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La connaissance pure du droit et ses limites.

La connaissance pure du droit et ses limites. Sandrine PINA. Docteur en droit , Universit d'Auvergne. La puret (Reinheit), le pur (rein) d signent ce qui ne contient aucun l ment tranger, ce qui est sans m lange, ni alt r , ni vici . Chez Kant, nous trouvons le terme de puret avec la Critique de la raison pure, relative la raison comme facult de conna tre consid r e ind pendamment de toute application de l'exp rience. Au niveau des sciences, peu d'entre elles peuvent r pondre ce postulat de la puret , mis part les sciences math matiques. Le terme pur' a t utilis en Gr ce par ceux qui pratiqu rent simultan ment philosophie et math matiques. Les cercles pythagoriens l'avaient en pr dilection et Platon l'a plac au centre de sa terminologie scientifique 1. En effet, les math matiques sont, par excellence, l' cole de la pr cision et de la rigueur. Le math maticien avance en terrain s r proc dant avec une extr me rigueur en ne concluant rien sans l'avoir strictement d montr . Une proposition est d montr e lorsqu'elle est d duite logiquement et n cessairement de propositions d j admises.

La connaissance pure du droit et ses limites. Sandrine PINA Docteur en droit, Université d’Auvergne. La pureté (Reinheit), le pur (rein) désignent ce qui ne contient aucun élément étranger, ce qui est sans mélange, ni altéré, ni vicié.

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1 La connaissance pure du droit et ses limites. Sandrine PINA. Docteur en droit , Universit d'Auvergne. La puret (Reinheit), le pur (rein) d signent ce qui ne contient aucun l ment tranger, ce qui est sans m lange, ni alt r , ni vici . Chez Kant, nous trouvons le terme de puret avec la Critique de la raison pure, relative la raison comme facult de conna tre consid r e ind pendamment de toute application de l'exp rience. Au niveau des sciences, peu d'entre elles peuvent r pondre ce postulat de la puret , mis part les sciences math matiques. Le terme pur' a t utilis en Gr ce par ceux qui pratiqu rent simultan ment philosophie et math matiques. Les cercles pythagoriens l'avaient en pr dilection et Platon l'a plac au centre de sa terminologie scientifique 1. En effet, les math matiques sont, par excellence, l' cole de la pr cision et de la rigueur. Le math maticien avance en terrain s r proc dant avec une extr me rigueur en ne concluant rien sans l'avoir strictement d montr . Une proposition est d montr e lorsqu'elle est d duite logiquement et n cessairement de propositions d j admises.

2 Les math matiques apparaissent par cons quent comme un domaine o l'on se soucie de la v rit . L'id e d'une science pure du droit - jus strictum -, d gag e de toute consid ration sociale et conomique, est issue d'une tradition kantienne laquelle se rattachent plusieurs auteurs. Dans cette perspective kantienne, l'analyse des normes repose sur une exigence de non contradiction, situ e au plan abstrait de la valeur, et non celui, concret, des faits empiriques. Il importe peu de savoir si les individus appliquent ou non les r gles de droit dans la r alit ; les violations de la loi, en tant que telles, sont impuissantes fonder une valeur g n rale, m me si telle est la volont de leurs auteurs. Cette ext riorit de l'analyse des normes par rapport aux faits sociaux est caract ristique de tout le mouvement positiviste de philosophie du droit qui s'est largement exprim en Europe la fin du XIXe si cle. Dans le cadre de la construction d'une th orie pure du droit , le projet du juriste autrichien Hans Kelsen suivant la voie trac e par Kant est le plus abouti.

3 En effet, la th orie pure du droit de Kelsen r pond la double exigence d'objectivit et d'exactitude, en m me temps qu'il veille l'individualit et l'intelligibilit de son propre objet : le droit . La perspective pist mologique est tr s claire et pr cis ment circonscrite : la th orie du droit doit tendre une v ritable science, c'est- -dire r pondre de mani re critique et m thodique la connaissance exacte et approfondie du droit . C'est en ce sens qu'elle peut pr tendre se d finir comme th orie de la connaissance juridique. Son projet pist mologique vise ainsi fonder une science part enti re, en ne se confondant pas avec les sciences causales ou sociologiques et ayant son objet et sa m thodologie propres. L' pist mologie est un aspect central de la doctrine kels nienne, et en particulier la d marche par laquelle elle cherche constituer l'objet d'une science du droit 2. 1. Hermann COHEN, Logique de la connaissance pure , in N okantismes et th orie de la connaissance (sous la direction de Marc DE LAUNAY), Biblioth que des textes philosophiques, Librairie J.

4 Vrin, Paris, 2000, p. 52. 2. Michel TROPER, La pyramide est toujours debout ! R ponse Paul Amselek , RDP, 1978, p. 1536. La th orie kels nienne constitue une th orie pure de l'objet droit consid r de fa on autonome. Dans sa th se d'habilitation Hauptprobleme der Staatsrechtslehre en 1911, Kelsen pr cise d j que sa th orie du droit n'entend tudier que le seul droit positif comme objet de connaissance scientifique3. Son but est ainsi de d voiler les conditions de possibilit d'une v ritable science du droit , c'est- -dire comment rendre possible une tude scientifique du droit positif, des normes juridiques, du droit cr et appliqu par les hommes. Toutefois, la science du droit ne doit pas se confondre avec son objet. Ceci implique une distinction fondamentale entre science du droit et droit . La science du droit vise la description du droit au travers d' nonc s que Kelsen appellera des propositions juridiques . (Rechtss tze). Le droit , quant lui, est un ensemble de normes, un ensemble de prescriptions r gissant la conduite humaine.

5 Les normes vont autoriser, habiliter, interdire ou encore permettre certains comportements humains. Kelsen a proc d une v ritable r duction pist mologique fondamentale. La th orie pure du droit ne traitera que de la structure normative du droit . Les propositions juridiques constituent une structure logique labor e par la science partir des normes. Le droit est r duit la seule norme juridique positive dans le but affirm d' laborer les conditions de possibilit de toute connaissance juridique. Cette r duction pist mologique intervient en r action aux doctrines traditionnelles h t ronomes qui int graient dans le champ de la science du droit des l ments relevant de sciences annexes et sera radicalis e pour r pondre au postulat de la puret et de l'ind pendance de la science du droit . Cette approche exclusivement scientifique entra ne, par ailleurs, une v ritable neutralit axiologique. Kelsen cherche l'essence m me du droit . Toutefois, l' tude des normes doit se r aliser sans appr ciation de leur contenu.

6 En accord avec le postulat de la neutralit . axiologique du sociologue allemand Max Weber, Kelsen carte toute estimation qui est, par d finition, non-scientifique. Ces estimations sont entendues comme des jugements de valeur personnels et subjectifs. Cette vacuation de la question du contenu - juste ou injuste - des normes est r alis e au profit d'une exigence de formalisme. Kelsen tente d' laborer une th orie scientifique du droit . Dans ce cadre, une th orie scientifique, une th orie de la connaissance se doit d' tre universelle pour tre coh rente et applicable. La question du contenu des normes n'est donc r gl e chez Kelsen que par le processus de cr ation positive du droit tel qu'il est pos dans la Constitution. La th orie kels nienne ne s'int resse qu'au fondement de la validit de l'ordre juridique, lequel repose sur une norme supr me fondamentale. La seule question demeure celle de la compatibilit des normes entre elles, de leur fondement de validit dans la norme sup rieure.

7 Kelsen r pondra cette interrogation par la mise en exergue d'un mode d'engendrement des normes essentiellement dynamique. En proc dant une r duction pist mologique combin e une neutralit . axiologique, cette m thode veut aboutir une connaissance compl te et rigoureuse du droit . En ce sens, nous analyserons tout d'abord les conditions de possibilit d'une th orie pure du droit chez Kelsen (I) puis nous verrons quelles sont les limites inh rentes une telle connaissance pure (II). 3. Hans KELSEN, Hauptprobleme der Staatsrechtslehre, entwickelt aus der Lehre vom Rechtssatze, (Probl mes fondamentaux de la th orie juridique de l'Etat), Verlag von JCB M hr, Paul Siebeck, T bingen, 2e d., 1923, p. VII. I- LA SCIENCE PURE KELSENIENNE. La th orie pure du droit de Kelsen se caract rise par la volont d'assurer l'autonomie de la science du droit par rapport aux autres sciences. Cette autonomie est pouss e dans ses extr mes limites travers l'argument transcendantal, permettant de justifier le droit par le droit (B).

8 Une science pure du droit , c'est- -dire purement normative, doit rester coup e des autres sciences, et notamment des sciences bas es sur les faits (A). La science kels nienne est une tude bas e sur la pure normativit . A- L'AUTONOMIE DU droit . Le positivisme juridique de Hans Kelsen peut se concevoir comme une tentative de r habilitation de la normativit dans les th ories juridiques tout en y excluant les th ses et les arguments des th ories du droit naturel. Afin de r aliser ce projet et d' viter tout syncr tisme m thodologique, Kelsen utilise une m thode descriptive et purement scientifique. Par positivisme, il entend construire une science du droit o le juriste doit se borner conna tre son objet sans porter aucun jugement de valeur. Le positivisme assigne comme objet la science du droit le droit positif parce qu'il est le seul qui soit susceptible d'une tude scientifique. Toute r flexion sur un autre objet que le droit est cart e4. Il n'existe aucun droit non positif au-dessus du droit positif envisag globalement et il n'existe qu'un seul droit positif.

9 Cette science du droit peut tre d finie comme une activit cognitive visant donner une repr sentation du ph nom ne juridique conforme aux postulats m thodologiques employ s. La Th orie pure du droit de Kelsen ne s'int resse pas un ordre juridique particulier mais au droit positif en g n ral. En ce sens, la th orie pure est consid r e juste titre comme l'exemple paradigmatique du positivisme juridique car elle se caract rise par des exigences extr mes de positivit , cr ant ainsi un syst me g n ral du droit positif. Dans ce cadre, la th orie de Kelsen carte toute naturalit , factualit et subjectivit . Reconnaissons qu'au premier regard, ( ) la probl matique kels nienne semble dirig e de fa on radicale contre les th ories du droit naturel exactement comme la Critique de la raison pure appar t aux philosophes contemporains de Kant comme une machine de guerre destin e d truire la m taphysique ontologique traditionnelle 5. En effet, la th orie kels nienne construit une v ritable machine de guerre contre le positivisme traditionnel et veut d truire le syncr tisme m thodologique pour garantir une th orie pure et universelle du droit .

10 Hans Kelsen d finit le droit positif comme un ordre coercitif, les normes tant cr es par des actes de volont humains. Le positivisme juridique vise l' tude exclusive des actes de volont humains et ne prend pas en consid ration les normes manant d'une autre source. C'est pourquoi il exclut du domaine de la science du droit tout droit divin, c'est- -dire un droit qui est suppos avoir t cr par Dieu ou par une entit de genre divin 6. Le droit positif ne fait aucune r f rence un droit sup rieur. Kelsen ne reconna t que le droit positif7. 4. Le positivisme kels nien est caract ris par l'id e que la construction d'une science du droit est possible. Cela implique, par cons quent, une distinction entre le droit et la science du droit , une volont de limiter cette science la connaissance de son objet et une d finition pr cise de l'objet. La science du droit a pour fonction de d crire son objet par des propositions vraies. Michel TROPER, Le positivisme juridique , Revue de synth se, Centre international de synth se, philosophie et pist mologie juridiques, n 118-119, avril-sept 1985, p.


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