La forêt française face au changement climatique

1 La for t La for t fran aise fran aise face face au au changement climatique I. l est maintenant tabli que les for ts conna tront une nette volution du climat d'ici cent, voire cinquante ans. Vont-elles s'adapter, se modifier radicalement ou d p rir ? Pour r pondre ces questions, les chercheurs de l'Inra travaillent d crypter le fonctionnement de ces cosyst mes complexes ainsi que le dialogue intime qu'ils entretiennent avec le climat. Car si les for ts vont subir les assauts du changement climatique , elles sont aussi capables de l'att nuer. Les recherches de l'Inra ont galement l'objectif finalis de donner des solutions la fili re for t-bois pour une gestion durable de la ressource.

2 Pour un sylviculteur, cent ans, c'est aussi l' ge moyen d'exploitation d'un arbre. Il faut donc agir d s maintenant. Karen Beaucardet William Bareffot Inra / Michel Meuret 1 changement climatique : quoi peut-on s'attendre ? Le changement climatique modifie le fonctionnement de l'arbre et de l' cosyst me forestier en g n ral. Certains effets peuvent tre b n fiques, la plupart sont n fastes en l'absence d'adaptation. Les extr mes climatiques pourraient aussi jouer un r le d cisif. Malgr des incertitudes, les nombreuses recherches de l'Inra permettent d'entrevoir les impacts venir, les peuplements les plus vuln rables ainsi que des pistes d'adaptation.

3 2. 011 a t d clar e ann e sions du Grenelle de l'environnement gement climatique sur chacun de ces internationale des for ts et des Assises de la for t. cosyst mes, en tenant compte de leurs par l'assembl e g n rale de La for t est galement un r servoir de sp cificit s (sol, essences, climat local, l'ONU. Si les for ts sont ainsi biodiversit , car elle reste un cosys- pratiques sylvicoles). mises l'honneur, c'est en raison des t me prot g o l'homme intervient nombreux services qu'elles rendent peu en comparaison avec les zones Changements multiples, la soci t . Stockage du CO2, produc- cultiv es.

4 La diversit de la for t fran- effets contrast s tion d'eau de qualit , action sur le aise m tropolitaine est d'ailleurs L'intensit des changements venir microclimat, protection des sols unique en Europe. La France tant fait encore d bat, en raison d'incerti- contre l' rosion ou tout simplement situ e au carrefour de quatre zones tudes inh rentes aux pr visions des accueil du public, leur apport est loin bioclimatiques, on y compte autant missions de gaz effet de serre (GES). de se cantonner la production de d' cosyst mes forestiers diff rents : la En revanche, la nature de ces volu- bois. L'usage du bois lui-m me va se for t de plaine atlantique, dont la for t tions est maintenant bien connue : diversifier avec de nouvelles utilisa- de pin maritime en Aquitaine, la for t augmentation de la concentration en tions nerg tiques de la biomasse de plaine semi-continentale, la for t de CO2 dans l'atmosph re, hausse des ligneuse (chaufferies bois, biocarbu- montagne et la for t m diterran enne.)

5 Temp ratures, modifications du r gime rant). Au niveau national, l'impor- A l'Inra, plusieurs centres (Nancy, pluviom trique. A ces tendances tance de cette multifonctionnalit a Bordeaux, Orl ans et Avignon) s'em- moyennes s'ajoutent des pisodes t rappel e en 2007 par les conclu- ploient lucider les impacts du chan- extr mes (s cheresses, canicules, tem- II I NRA MAGAZINE N 17 JUIN 2011. p tes) potentiellement plus fr quents Des chenilles qui ne perdent pas le nord et la progression des stress biotiques (ravageurs, maladies). Le changement climatique Quelles sont les cons quences de ces favorise aussi la propagation volutions sur la production de la for t de certains bioagresseurs des et donc sur sa capacit stocker du esp ces foresti res.

6 L'expan- carbone ? En r alit , les effets des dif- sion de la processionnaire du f rentes composantes du changement pin vers le nord et en altitude climatique sont contrast s. Deux fac- est embl matique de ce ph - teurs agissent dans le sens d'une am - nom ne. A tel point que lioration de la productivit : d'une l'Onerc* consid re cette part, l'augmentation de la concentra- progression comme un bio- indicateur du changement cli- Inra / Christelle Robinet tion en CO2 de l'atmosph re (+ 40%. depuis le milieu du XXe si cle) qui sti- matique. Les chenilles de cet mule l'activit photosynth tique des insecte se r galent des arbres.

7 D'autre part, une hausse mesu- aiguilles de diff rents pins r e des temp ratures allonge la saison comme de celles des c dres de v g tation des arbres, en avan ant et peuvent consid rablement . les stades de d veloppement au prin- freiner le d veloppement de CORT GE de chenilles processionnaires dans un pin. temps et en retardant l'arr t physio- ces essences. De plus, h ris- logique l'automne. Par contre, la s es de poils urticants, elles posent galement un probl me sanitaire pour l'homme hausse des temp ratures augmente les et les animaux en provoquant des allergies. besoins en eau des v g taux, demande Les chenilles de la processionnaire du pin meurent en dessous de -16 C.

8 D'autre qui pourrait tre plus difficile satis- part, pour se nourrir, elles ont besoin la fois d'une temp rature dans le nid sup rieure faire l'avenir en raison de l'augmen- 9 C pendant la journ e et d'une temp rature ambiante sup rieure 0 c pendant la tation de l' vapotranspiration et de la nuit. Le r chauffement climatique augmente donc le nombre de jours au cours desquels diminution des pr cipitations. Les elles peuvent se nourrir et progresser entre octobre et mars. L'augmentation des mod les climatiques pr voient en effet temp ratures a rendu l'ensemble de la r gion parisienne propice leur d veloppement des pr cipitations parfois plus impor- d s 2004.

9 La question est donc de savoir quelle vitesse l'esp ce va avancer dans cet tantes en hiver, mais globalement plus espace devenu accueillant. L'unit de zoologie foresti re du centre Inra d'Orl ans a rares en t au moment o la v g ta- mod lis le front d'expansion de la processionnaire du pin en fonction des possibili- tion en a le plus besoin. t s d' volution du climat. Le sc nario le plus optimiste indique une colonisation attei- Quel sera le bilan au final ? Cette gnant Paris d s 2025. Leur apparition en zone urbaine est d'autant plus inqui tante que question pose un v ritable d fi la les populations ne sont pas habitu es s'en m fier.

10 La pr vision des futures zones . recherche. En effet, l'analyse dendro- risques constitue donc un enjeu majeur pour cibler les mesures de pr vention. m trique (1), qui a longtemps servi * Observatoire national sur les effets du r chauffement climatique pr voir la productivit des for ts, ne s'applique plus sur les bases classiques qui supposent un environ nement justement l'un des objectifs de galement analys e. Cet observatoire constant. Il faut donc aller plus loin l'observatoire de recherche et d'exp - comprend un r seau dense de placet- et approfondir les connaissances sur rimentation en environnement tes d'observation et une quinzaine de le fonctionnement primaire de la F-ORE-T mis en place en 2002 par sites-ateliers quip s de nombreux for t : les flux et les stocks de carbone, l'Inra et ses partenaires (2).