Le concept d'humanitude: une application aux soins ...

1 Le concept d humanitude : une application aux soins infirmiers g n raux Margot Phaneuf, inf., Ph. D. Introduction Les soins infirmiers se d finissent partir de diff rents mod les th oriques qui visent tous la prestation de soins de qualit , l autonomie et l ind pendance du sujet qui requiert des soins , de m me qu une vision globale de sa personne et de ses capacit s. Ces mod les se d clinent en diverses applications favorisant l organisation des soins et une plus grande pr cision du r le de l infirmi re aupr s du malade et dans la soci t . Il demeure toutefois que nous avons grand besoin de raviver la flamme qui devrait animer nos soins , car qui de nous n a pas entendu ici ou l des critiques d non ant leur d shumanisation.

2 Il n y a h las, pas de rem de miracle ce mal. Mais peut- tre que nous aurions besoin de rendre les choses plus concr tes pour les soignantes et les tudiantes et que nous devrions fonder nos actions sur certaines notions fondamentales de ce qui fait essentiellement l humain, sur ce qui d termine profond ment ses besoins et sur l importance d en tenir compte pour le soin des malades. LE concept LE concept DD HUMANITUDEHUMANITUDE (5)L humanisme est une cole de pens e philosophique pour qui l homme est la mesure de tout et pour laquelle ilconstitue la valeur supr me. L humain est une fin en soi et non un pens e est sous-tendue par des valeurssup rieures de recherche du beau et du bien qui, dansnotre domaine des soins , sont mises au service du bien- treet de la sant du malade.

3 Ces principes sont essentiels pour donner un sens nossoins, souvent trop techniques et deshumanis s. Ils permetent de leur conf rer ce que Bergson appelait un suppl ment d me . Dans la pratique, cela nous conduit au respect de l trehumain, de sa dignit , de son unicit et de son int grit .L humanisme : d finitionIl existe un concept anthropologique d s plus simple peut- tre susceptible de nous aider dans ce sens. C est celui de l humanitude popularis par Yves Gineste et Rosette Marescotti pour les personnes g es en perte d autonomie cognitive. En faire une application aux soins g n raux pourrait s av rer int ressant, car ce concept pourrait probablement inspirer nos contacts avec les malades, quels que soient leur ge ou leurs probl mes et redonner leur noblesse des soins quotidiens qui nous paraissent souvent plut t banals et monotones.

4 1 1. Gineste Yves et Rosette Marescotti. soins , corps communication. Les liens d humanitude ou l art d tre ensemble jusqu au bout de la vie 1 Distinction entre deux concepts importants Nous connaissons d j le concept d humanisme tr s r pandu parmi les professionnels de la sant . C est en r alit une orientation qui n est pas nouvelle, mais qui conserve toujours toute son importance. Il ne faut pas confondre ce concept avec celui d humanitude propos ici et surtout ne pas croire que ce dernier puisse liminer l autre. En r alit , ils sont intimement li s. L humanisme est un concept philosophique qui nous montre l importance de la place de l homme dans le monde, alors que l humanitude , un concept de nature plut t anthropologique, nous fait voir les racines de notre condition humaine et par l m me, ce qui en fait l essence.

5 Nous pouvons ensuite extrapoler la n cessit d en tenir compte dans une discipline comme celle des soins infirmiers et r aliser les prises de conscience que cela peut g n rer. Pourquoi un concept de plus? On peut se demander pourquoi proposer ce nouveau concept ? C est d abord en raison de ses qualit s concr tes, puis de la possibilit qu il nous offre de donner sens des soins trop souvent devenus routiniers et parfois consid r s comme secondaires. En effet, pour nombre d infirmi res les soins tirent leur noblesse de leur prestige th rapeutique associ la technologie et la pharmacologie.

6 Il ne faut pas nier l importance de ces soins qui dans l historique de notre profession ont fait beaucoup pour relever le niveau de sa valeur sociale et professionnelle. LE concept LE concept DD HUMANITUDEHUMANITUDE (5)L humanisme est un concept philosophique n dans l antiquit de penseurs tels que Protagoras, au Ve si cle avant Chez les romains il signifiait d j toute chose levantl'homme une place part des autres tres vivants. Ses racines remontent aussi la renaissance avec Rabelais et Montaigne. Il s est ensuite exprim travers les penseurs des Lumi res et plus pr s de nous travers le philosophe Kant. De nos jours et plus pr s de nous en soins infirmiers, cesont les penseurs Abraham Maslow et Carl Rogers qui en sont les d positaires les plus connus.

7 L humanisme : origineRappelons qu il y a un peu plus d un demi-si cle, le r le des infirmi res tenait plus de celui de la boniche que de celui de la professionnelle. D aucun penseront que c est tr s loin par rapport nous, mais en r alit c est court par rapport l histoire d une profession comme la n tre. ce temps, le d vouement, la bont et l empathie taient bien au rendez-vous, mais les soins se limitaient presque au confort et l hygi ne. Certains diront, avec raison d ailleurs, que c tait d j beaucoup, mais il faut quand m me admettre que les moyens d intervention d alors taient fort limit s. Notre profession a par la suite grandi l ombre de la m decine pour devenir aujourd hui plus autonome en d veloppant un savoir qui, tout en s appuyant sur des techniques, des strat gies de soins sophistiqu es et sur des connaissances venues d autres disciplines, a su laborer sa propre identit et d velopper un savoir propre et un certain humanisme.

8 2Ce qu il nous faut regretter ce n est pas la venue de cette volution technologique et m dicale, mais plut t le fait qu elle occupe trop souvent toute l avant-sc ne des soins et mobilise trop le temps de l infirmi re aupr s du malade, de telle sorte qu elle n a peu pr s plus le loisir de cr er un v ritable lien th rapeutique avec lui. Un document central dans notre monde professionnel, La mosa que des comp tences cliniques de l infirmi re (OIIQ, 2001) parle de partenariat de soins ; mais comment est-ce possible dans le contexte actuel de roulement du personnel et de lourdeur des t ches? Ce qu il nous faut trouver c est un meilleur quilibre, technologie/relation, toutefois cela demeure encore un d fi de taille.

9 Un autre probl me rel ve plut t du monde de l ducation. Il consiste dans la difficult de communiquer nos jeunes le go t de cette qualit d tre, de ce s rieux et de cette motivation se tourner vers l autre pour le comprendre et pour agir. Il s agit en somme, de la n cessit d insuffler nos tudiantes ce qui fait la qualit profonde d une infirmi re. LE concept LE concept DD HUMANITUDEHUMANITUDE (5)Ce te rme re couvre l e nse mble des cade aux d volution que les humai ns se s ont fai ts les uns les aut re s au cours des g n rations , de puis qu ils ont conscience d tre et qu'ils peuvent se faire encore en un e nric his se me nt s ans limite (Albert Jacquard, Cinq Milliards d'hommes dans un vaisseau", ditions S euil.)

10 //pers manitu )L humanitude Aussi, pour faire appel cette motivation qui d termine les comportements, il faut leur proposer des buts emballants, des concepts organisateurs qui p n trent intimement les actions du quotidien et leur conf rent une profondeur qui soit le gage de leur qualit et de l humanisme qui doivent les sous-tendre. Il devient ainsi n cessaire de chercher une inspiration plus concr te, plus tangible pour int resser nos jeunes et redonner aux soins un souffle pour les animer. Le concept d humanitude pr sente cet int r t de nous montrer comment des comportements et des actions simples rejoignent l tre dans ce qu il a de plus essentiellement humain et tirent leur efficacit de la correspondance notre d veloppement archa que.