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Stratégie pour favoriser le transfert des connaissances

Strat gie pour favoriser le transfert des connaissances par Jacques Tardif et Philippe Meirieu * La colombe l g re, quand, dans son libre vol, elle fend l'air dont elle sent la r sistance, pourrait s'imaginer qu'elle volerait mieux dans le vide (Kant). C'est un lieu commun de reconna tre que le transfert des connaissances est un ph nom ne qui se produit rarement en milieu scolaire, peu importe l'ordre d'enseignement pris en consid ration. D'une part, les fronti res de l'institution scolaire paraissent difficilement franchissables pour les connaissances : celles qui sont construites dans la vraie vie n'entrent pas l' cole et celles qui sont construites l' cole n'en sortent pas. D'autre part, l'int rieur m me de l'institution scolaire, les connaissances construites par les l ves se heurtent des barri res quasi imperm ables: elles ne sont pas facilement transf rables en dehors de l'ordre d'enseignement, de la classe ou de la discipline o elles ont t construites.

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1 Strat gie pour favoriser le transfert des connaissances par Jacques Tardif et Philippe Meirieu * La colombe l g re, quand, dans son libre vol, elle fend l'air dont elle sent la r sistance, pourrait s'imaginer qu'elle volerait mieux dans le vide (Kant). C'est un lieu commun de reconna tre que le transfert des connaissances est un ph nom ne qui se produit rarement en milieu scolaire, peu importe l'ordre d'enseignement pris en consid ration. D'une part, les fronti res de l'institution scolaire paraissent difficilement franchissables pour les connaissances : celles qui sont construites dans la vraie vie n'entrent pas l' cole et celles qui sont construites l' cole n'en sortent pas. D'autre part, l'int rieur m me de l'institution scolaire, les connaissances construites par les l ves se heurtent des barri res quasi imperm ables: elles ne sont pas facilement transf rables en dehors de l'ordre d'enseignement, de la classe ou de la discipline o elles ont t construites.

2 De plus, la question du transfert des connaissances se pose m me l'int rieur d'une discipline lorsque les l ves passent de la le on la pratique ou encore d'une pratique une autre. La r ussite dans une discipline n'est pas constante, ind pendamment du contexte des travaux. Il est d'ailleurs fr quent d'entendre des enseignants du secondaire se plaindre du fait que leurs l ves ont gard peu de connaissances de leur passage l' cole primaire. Les enseignants du coll gial portent aussi le m me jugement l'endroit des jeunes qui viennent du secondaire et les professeurs d'universit mettent des commentaires semblables quant aux l ves qui sortent du coll gial. De plus, les enseignants de sciences physiques, de sciences de la nature et de sciences humaines d plorent que leurs l ves, au moment o ils doivent recourir des graphiques par exemple, ne puissent r utiliser les connaissances qu'ils ont construites dans la classe de math matique.

3 Il en est ainsi pour les enseignants d'histoire et de g ographie qui observent que les connaissances construites en classe de fran ais relativement aux r gles grammaticales et aux homophones sont inop rantes dans leur classe. Il est galement tonnant que des l ves qui ma trisent tr s bien la d marche de r solution de probl mes en math matique ne puissent la reprendre d'une fa on consciente et fonctionnelle dans d'autres disciplines. Comment se fait-il que ces derniers ne soient pas en mesure d'aborder la production d'un texte en accordant d'abord de l'attention la repr sentation du probl me, en posant ensuite plusieurs hypoth ses de solution, en essayant par la suite la solution la plus vraisemblable et en valuant finalement l'ad quation de la solution retenue compte tenu du probl me initial? Les limites li es aux connaissances construites en milieu scolaire soul vent des questions pineuses quant leur degr de transf rabilit et, tout particuli rement, quant aux probabilit s que l' cole puisse agir significativement sur leur transfert .

4 Pour notre part, nous estimons que l'institution scolaire peut grandement influer sur le transfert des connaissances . Nous croyons par ailleurs que de nombreux enseignants sont activement engag s dans la recherche de strat gies et de moyens en vue de susciter, voire de provoquer le transfert des connaissances chez leurs l ves. Les diverses interventions p dagogiques et didactiques visant soutenir le transfert des connaissances soul vent toutefois une question essentielle: faut-il favoriser les strat gies g n rales ou les strat gies relatives des connaissances particuli res? L'objectif du pr sent texte est de contribuer au d bat qui a cours depuis fort longtemps au sujet de la pr pond rance ou non des strat gies g n rales sur les strat gies relatives des connaissances particuli res. Il vise surtout fournir aux enseignants des pistes leur permettant de prendre des d cisions judicieuses quant aux d marches privil gier dans leur enseignement.

5 Avant d'aborder ce d bat explicitement, il nous semble toutefois n cessaire de pr ciser bri vement ce qu'est le transfert des connaissances . Qu'est-ce que le transfert d'une connaissance? Le transfert d'une connaissance est essentiellement une forme de recontextualisation de cette derni re, une sorte de transport de la connaissance en question d'une situation A une situation B et, id alement, N + 1 situations. Le transfert se produit lorsqu'une connaissance acquise dans un contexte particulier peut tre reprise d'une fa on judicieuse et fonctionnelle dans un nouveau contexte, lorsqu'elle peut tre recontextualis e. Cependant, il importe de signaler que, pour pouvoir recontextualiser une connaissance, l' l ve doit y avoir acc s en m moire. C'est l une condition incontournable pour que le transfert soit possible. Pour augmenter les probabilit s qu'un l ve puisse avoir acc s une connaissance en m moire, celle-ci doit avoir t d contextualis e et, en plus, elle doit avoir t mise en relation avec d'autres connaissances .

6 L'organisation des connaissances constitue alors une autre condition incontournable pour que le transfert puisse se produire. Pour reprendre la dynamique du transfert des connaissances d'une fa on plus op rationnelle, il est essentiel de reconna tre que toute connaissance porte in vitablement la marque de son contexte initial d'acquisition. Ce contexte d'acquisition fait partie int grante de la connaissance acquise. Il peut tre tr s variable et, actuellement l' cole, les enseignants valorisent grandement les situations concr tes, proches des pr occupations imm diates des l ves. Cette orientation qui consiste s'ancrer dans les champs d'int r ts des l ves devient, entre autres choses, n cessaire afin de lutter contre leur d motivation. Le fait de contextualiser une connaissance lui accorde plus de signification et, en cons quence, plus de stabilit cognitive.

7 Toutefois, il faut tre conscient que, paradoxalement, un tel ancrage rend encore plus difficiles le transfert et la d contextualisation des connaissances . Dans une deuxi me phase suivant la contextualisation, il devient important de recontextualiser la connaissance en question, c'est- -dire de l'appliquer dans diff rentes situations. A ce moment-l , les interventions p dagogiques agissent d'une mani re dirig e sur le transfert d'une connaissance. Pour ce, il est fondamental que l'enseignant insiste sur plusieurs exemples de recontextualisation, des exemples vari s quant leur nature et leurs donn es de surface, et que les conditions qui justifient la transf rabilit soient explicites pour l' l ve. L'essentiel consiste non pas donner de nombreux exercices d'application diff rents, mais demander l' l ve de chercher des contextes diff rents o il peut r utiliser la connaissance.

8 Dans cette d marche, l'enseignant travaille avec l' l ve sur l'ad quation entre le contexte et les outils et il introduit progressivement, par l'analyse de cas concrets, la distinction entre les indicateurs de surface et les indicateurs de structure. Dans une troisi me phase, on isole la connaissance de son contexte initial et des situations de recontextualisation. Nous voulons toutefois attirer l'attention sur le fait que cette troisi me phase se situe beaucoup plus en relation de simultan it qu'en relation de s quentialit avec la deuxi me. L'enseignant contribue alors donner plus de pr gnance la connaissance en question. Celle-ci est pr sent e l' tat pur; il s'agit essentiellement d'une dissociation entre la figure et le fond. A partir des situations de recontextualisation de [d but de la page 5 du texte original] la phase pr c dente, l'enseignant conduit progressivement les l ves d gager les invariants structurels et conceptuels.

9 En faisant r f rence au concept d' chafaudage de Vygostky (1978), l'enseignant, dans une d marche o l'assistance est grande pendant les premi res interventions et r duite graduellement par la suite, aide les l ves stabiliser sur le plan intrapersonnel ce qui a t v cu et exp riment sur le plan interpersonnel. Pour illustrer cette dynamique du transfert , nous ferons r f rence l'enseignement et l'apprentissage du pourcentage. Dans une perspective de contextualisation, l'enseignant pourrait introduire cette notion en recourant la situation o il faut calculer le montant des taxes sur la vente d'une bicyclette. Par la suite, en visant un objectif de recontextualisation, l'enseignant pr senterait des situations qui exigent le calcul de diff rents rabais sur des achats, comme il pourrait demander aux l ves de d terminer les imp ts f d ral et provincial que doivent payer des citoyens compte tenu de leurs revenus annuels.

10 Il importe toutefois de remarquer que ces situations de recontextualisation sont univoques dans le sens o il est toujours question de sommes d'argent. Leurs indicateurs de surface sont semblables et, en cons quence, les l ves ne peuvent les distinguer des indicateurs de structure. Le transfert des connaissances est ainsi peu favoris et peu susceptible de se produire. Il est alors capital que l'enseignant introduise des situations qui offrent des variations importantes quant aux indicateurs de surface, dans le but que les l ves diff rencient les indicateurs de surface des indicateurs de structure. A titre d'exemple, il pourrait proposer des situations o les l ves doivent calculer le pourcentage des filles par rapport celui des gar ons dans une cole et le pourcentage que repr sente l' tendue des for ts dans un pays par rapport l' tendue des sols en culture.


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